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Education communiste

leçon 3 : la démocratie française et son avenir

école élémentaire de la Libération (octobre 1944)

mardi 28 octobre 2008

INTRODUCTION

- Nous voulons voir la France devenir une véritable démocratie où la souveraineté populaire ne sera pas une formule, mais une réalité.

- C’est ainsi que, dans son rapport au comité central du parti communiste français du 31 aoà»t 1944, notre camarade Jacques Duclos a défini un des objectifs essentiels de notre parti. Notre parti a réalisé contre le fascisme l’unité du pays, il combat pour une démocratie réelle, il revendique l’usage d’une véritable souveraineté populaire. Autant de problèmes sur lesquels un communiste français doit être éclairé. Il ne peut l’être qu’àla lumière de la théorie marxiste-léniniste. Toutes ces questions posées par l’actualité française touchent àun problème plus général : le problème de l’état. Donner àchaque membre du parti les notions qui lui sont indispensables pour mieux comprendre ce qu’a été la démocratie française et ce qu’elle doit être, tel est l’objet de cette troisième brochure dans laquelle, comme dans les précédentes, la théorie ne saurait être séparée de la vie.
- Nous allons étudier successivement :

  1. Le problème de l’état ;
  2. L’organisation de la démocratie dans la France d’avant-guerre ;
  3. Le fascisme ;
  4. La lutte pour une démocratie réelle ;
  5. La démocratie soviétique comme type d’état socialiste.

NOTIONS THÉORIQUES SOMMAIRES SUR LE PROBLÈME DE L’ÉTAT

- Qu’est-ce que l’état ?
- L’état est un mot qu’on emploie souvent et que l’on confond quelquefois avec un autre mot : nation. Il faut donc définir clairement ce qu’on entend par état. Prenons un exemple. Le gouvernement d’un pays se réalise au moyen d’un certain nombre d’organismes. Dans la France de 1939, il y avait un président de la République, des ministres, des chambres, des conseils généraux, des conseils municipaux, des corps de fonctionnaires, des juges, une police, etc...
- L’ensemble des organismes par lesquels se réalise le gouvernement d’un pays, c’est l’état.
- Chacun comprend dès lors qu’il y a différents types d’états. Dans le même temps, il peut y avoir des états bien dissemblables. Songez àtout ce qui pouvait différencier, en 1939, des états comme l’état français, l’état américain, l’état hitlérien ou l’état soviétique. Par ailleurs, l’état est une réalité sociale. Or, toutes les réalités sociales évoluent. Elles se transforment. L’état, lui aussi, a évolué àtravers les générations.

- L’état n’a pas toujours existé
- L’état n’a pas existé de tout temps. Il y eut des sociétés qui s’en sont passées et qui n’avaient pas la moindre notion de l’état et du pouvoir gouvernemental.

  • Engels

- Songez, pour comprendre ce passage de F. Engels, àce qui se passait il y a plusieurs milliers d’années. Les hommes étaient primitifs, très arriérés. Ils vivaient par petits groupes, en tribus. Ils produisaient si peu qu’il était impossible aux uns de vivre aux dépens des autres. Il n’y avait ni exploiteurs, ni exploités. Car l’exploitation de l’homme par l’homme n’est possible que si l’homme peut produire des moyens d’existence non seulement pour soi, mais encore pour les autres. Dans cette société primitive, il n’y avait pas d’état. Le besoin de gouverner, d’imposer un « ordre » quelconque ne se faisait pas sentir. Les hommes suivaient volontairement les usages de la tribu et les conseils des plus expérimentés d’entre eux qu’ils choisissaient comme chefs.

- L’état naît avec la division de la société en classes
- Mais voici que la production progresse : élevage du bétail, agriculture, métiers domestiques. Dès lors, certains hommes peuvent vivre du travail des autres. La société comprendra donc une minorité qui tire profit du travail des autres, et le reste de la population (au début, notamment, les prisonniers de guerre) qui travaille pour cette minorité. D’où deux classes : une classe d’exploiteurs et une classe d’exploités. Il est bien évident que les exploités (ce furent d’abord des esclaves) n’ont jamais accepté de plein gré leur situation. Ils ont tendance àse révolter. La classe des exploiteurs a besoin d’un système de force qui maintienne les exploités dans l’obéïssance. C’est pourquoi
- apparaît un groupe spécial d’hommes occupé uniquement àgouverner et ayant besoin pour cela d’un appareil fait pour la contrainte : prisons, détachements spéciaux d’hommes, armée, etc.

  • Lénine, De l’état

- L’ensemble de ces hommes et de ces organismes chargés de gouverner qui apparaît quand la société se divise en classes, c’est l’état.

- L’état, instrument de domination d’une classe sur l’ensemble de la société
- Le premier état fut donc entre les mains d’un petit groupe de propriétaires d’esclaves, un instrument de domination sur les esclaves et l’ensemble de la société. Ce fut un état esclavagiste. Depuis, l’état a évolué. Il est devenu dans la France d’avant 1789 un état féodal par lequel les grands propriétaires terriens (seigneurs féodaux) dominaient sur la nation. Il est devenu après la Révolution de 1789 un état capitaliste par lequel une minorité parasite de plus en plus réduite par le développement des trusts domine sur l’ensemble du pays. Donc, l’état est
- en règle générale, l’état de la classe la plus puissante, de la classe économiquement dominante qui, grâce àl’état, devient également la classe politiquement dominante et acquiert ainsi de nouvelles ressources pour asservir et exploiter la classe dominée.

  • Engels

- Comment passe-t-on d’un état àun autre ?
- Ce qui précède montre qu’on ne peut pas passer insensiblement d’un type d’état àun autre. L’expulsion du pouvoir d’une classe dominante exige, implique la destruction de son état et la création d’un état nouveau. C’est ainsi qu’en 1789, l’état féodal fut détruit par le peuple de France àla tête duquel se trouvait la classe alors progressive : la bourgeoisie. Karl Marx a insisté aussi sur un autre apport de l’expérience populaire française dans la question de l’état :
- c’est la Commune de Paris de 1871 : République qui devait supprimer non seulement la forme monarchique de la domination de classe, mais la domination de classe elle-même.

- Disparition de l’état
- De même qu’il n’a pas toujours existé, l’état disparaitra. En effet, l’état est une forme spéciale d’oppression ; il arrivera un moment où, l’oppression ayant cessé, l’état lui-même dépérira. Nous avons vu dans la brochure précédente que le passage du socialisme au communisme avait pour résultat de faire disparaître les classes. C’est ce que F. Engels a précisé dans un passage célèbre :
- Nous marchons àprésent àgrands pas vers un développement de la production tel que l’existence des classes a non seulement cessé d’être une nécessité, mais devient un obstacle même àtoute production. Les classes disparaitront d’une façon aussi inévitable qu’elles se sont formées. En même temps que les classes disparaitront, disparaitra inévitablement l’état. La société qui organise ànouveau la production sur le principe de l’association libre et égale des producteurs relèguera la machine gouvernementale àla place qui lui convient : au musée des antiquités, àcôté du rouet et de la hache de bronze.
- De ce qui précède et qui résume très sommairement l’essentiel de la doctrine marxiste-léniniste de l’état, deux conclusions surtout sont àretenir :

  1. Il n’y a pas d’état en dehors de la réalité sociale. Il n’y a pas d’état en dehors des classes sociales. L’état est un instrument de domination d’une classe sur l’ensemble de la société. Mais il est bien évident que, dans certaines circonstances historiques, l’état, instrument de domination d’une classe dominante, peut subir une forte pression de la part des autres éléments qui constituent la société.
  2. L’état n’est pas un organisme politique immuable. Il n’a pas toujours existé. Il disparaitra un jour. Il évolue sans cesse par suite des transformations dans les modes de production et des bouleversements sociaux que provoquent ces transformations.

- Ce sont deux conclusions qu’il faut toujours avoir dans l’esprit quand on étudie les problèmes actuels de la démocratie et du fascisme.

LA DÉMOCRATIE EN FRANCE AVANT LA GUERRE

- La France était en 1939, àla veille de la guerre, un état démocratique. Demandons-nous :

  • a)ce qu’on entend par démocratie ;
  • b)comment était organisé l’état démocratique français ;
  • c)pourquoi cet état n’a pas assuré le bonheur du peuple, la sécurité et la puissance de la France.

- Principes de la démocratie
- C’est notre pays qui, dans la déclaration des droits de l’homme et du citoyen, a défini pour le monde entier les principes de la démocratie. Ces principes peuvent se réduire àtrois :

- Souveraineté nationale
- Dans l’état féodal, nous avons la souveraineté d’un homme, le pouvoir absolu du roi. La déclaration des droits de l’homme et du citoyen pose le principe de la souveraineté nationale. Les articles suivants définissent ce qu’on entend par souveraineté nationale :

  • Article 3. Le principe de toute souveraineté réside essentiellement dans la nation ; nul corps, nul individu ne peut exercer d’autorité qui n’en émane expressément.
  • Article 6. La loi est l’expression de la volonté générale ; tous les citoyens ont droit de concourir personnellement ou par leurs représentants àsa formation...
  • Article 15. La société a le droit de demander compte àtout agent public de son administration.

- Donc, il n’y a pas d’équivoque possible. Notez-le bien. La loi doit être l’expression de la volonté générale, et tout agent public est comptable de ses actes devant la société.

- Liberté
- Dans l’état féodal, il n’y a, pour la majorité de la population, ni liberté individuelle, ni liberté de pensée. La déclaration des droits de l’homme et du citoyen affirme que les hommes naissent libres. Elle précise :

  • Article 10. Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public établi par la loi.
  • Article 11. La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l’homme : tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf àrépondre de l’abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi.

- Egalité des droits
- Il ne s’agit pas d’une égalité de fait, mais d’une égalité en droits. Les hommes naissent et demeurent égaux en droits. Sur ce point encore, la déclaration des droits de l’homme et du citoyen apporte d’utiles précisions.

  • Article premier. Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l’utilité commune.
  • Article 4. Tous les citoyens, étant égaux aux yeux de la loi, sont également admissibles àtoutes dignités, places et emplois publics selon leur capacité et sans autres distinctions que celles de leurs vertus et de leurs talents.

- Tels sont donc les principes essentiels du régime démocratique. Le mot démocratie veut dire : gouvernement par le peuple. Notons :

  • que la France a été àl’avant-garde du progrès historique et qu’elle a, dès la fin du 18è siècle, établi les règles du gouvernement démocratique moderne ;
  • qu’il ne s’agit làque de principes, et qu’il peut y avoir loin entre les principes et l’application, entre ce que l’on appelle une démocratie formelle et une démocratie réelle. C’est ce qui apparaitra en pleine lumière dans l’étude politique de la France d’avant-guerre.

- L’organisation de l’état français d’avant-guerre
- La constitution française avait été établie, en 1875, par l’Assemblée nationale. Cette assemblée était composée, dans sa majorité, de députés réactionnaires et même royalistes : c’est ce qui explique la présence dans la constitution de 1875 de dispositions contraires aux principes démocratiques.
- En bref, on distinguait trois pouvoirs :

- Le pouvoir législatif
- Il était exercé par le parlement qui comprenait deux assemblées : la Chambre des Députés, élue au suffrage universel pour quatre ans, et le Sénat, élu au suffrage restreint pour neuf ans et renouvelable par tiers tous les trois ans. Le parlement discutait et votait les lois.
- Le pouvoir exécutif
- qui est chargé de mettre les lois en application. Il comprenait :

  • le Conseil des ministres, responsable devant le parlement (il devait se retirer devant un vote hostile) ;
  • le président de la République, élu par l’Assemblée nationale réunie àVersailles (Chambre et Sénat). Il désigne le président du Conseil, lequel choisit àson tour ses ministres.

- Le pouvoir judiciaire
- comprend les organes chargés en principe de réprimer la non-application des lois. Il était exercé par des juges. L’ensemble des tribunaux, des prisons, des forces de police formait l’appareil du pouvoir judiciaire.

- Pourquoi cet état n’a-t-il pas assuré le bonheur du peuple, la sécurité et la puissance de la France ?
- Donc, l’état français était avant la guerre un état du type démocratique. Et cependant, cet état n’a garanti ànotre peuple ni le bien-être, ni la puissance que la situation économique de la France rendait possibles (voir premier cours). Pourquoi ?
- Pour deux raisons essentielles :

  1. parce que les trusts étaient un obstacle àla traduction dans les faits des principes démocratiques ;
  • parce que le contrôle du peuple était insuffisant.

- Examinons rapidement ces deux points :

  • Les trusts contre la démocratie réelle
    - Il ne suffit pas de proclamer l’égalité des droits, la liberté ; il faut encore que les conditions soient réalisées pour faire de ces principes des réalités. Quelques exemples rendront cette affirmation très compréhensible.
    - Il ne peut y avoir égalité de droits s’il n’est pas donné aux enfants, quelle que soit leur origine sociale, la même chance de réussite. Or, toutes les tentatives d’une large démocratisation de l’enseignement se sont heurtées àl’intransigeance des trusts qui entendaient réserver àune caste docile et fermée l’accès aux « leviers de commande » de l’administration, de l’armée et de la vie économique.
    - Il ne peut y avoir liberté de la presse si l’on ne donne pas aux journaux populaires les moyens matériels d’assurer leur rédaction (locaux), leur impression (papier), leur diffusion (coopératives spécialisées de distribution). -En fait, dans une démocratie où les trusts domineraient, il n’y aurait liberté de presse totale que pour ceux qui peuvent, grâce àleur fortune, posséder les stocks de papier et les imprimeries. Ne voit-on pas aujourd’hui même les trusts rendre illusoire la liberté de la presse en réduisant la quantité de papier nécessaire àla parution des journaux authentiquement patriotes comme le plus grand journal politique de France : l’Humanité (rappel des articles de M. Cachin et de G. Cogniot dans l’Humanité).
    - La presse est libre quand les citoyens qui représentent un courant de l’opinion nationale disposent effectivement des locaux de rédaction, des rotatives, du papier.
    • Humanité, 14 septembre 1944

- A plus forte raison n’y a-t-il pas liberté de la presse quand l’influence des trusts sans patrie veut empêcher par la censure politique la presse populaire d’indiquer les vraies conditions du relèvement national.
- Il ne peut y avoir liberté d’opinion quand les trusts obtiennent dans les usines qu’ils contrôlent le renvoi des ouvriers coupables de développer les organisations syndicales, ou susceptibles de dresser l’ensemble des travailleurs de l’usine contre le sabotage de la reprise économique et de la défense nationale.
- Il ne peut y avoir liberté d’association et de réunion quand les locaux sont la propriété des trusts ou de leurs agents et que le peuple n’a pas la possibilité d’occuper des salles assez vastes pour organiser les réunions de propagande et d’éducation.
- Donc, nos ancêtres de 1789 ont proclamé les principes d’une large démocratie. Par suite de l’intervention d’une minorité parasite, par suite des agissements des trusts, cette démocratie est restée formelle, elle n’a pas été un gouvernement du peuple par le peuple.

- Le contrôle du peuple était insuffisant
- Il y avait en France le suffrage universel : tous les quatre ans le peuple désignait ses représentants. Notons que, par leur puissance financière, les trusts exerçaient sur la consultation électorale une influence antidémocratique (subventions aux journaux dociles, refus de salles aux candidats du peuple, éviction des ouvriers candidats ou propagandistes hostiles aux trusts, corruption, etc...). Mais, en outre, pendant quatre ans, les élus ne devaient aucun compte àleurs électeurs. Et c’est ce qui explique certains épisodes essentiels de notre histoire politique la plus récente.
- Le contrôle du peuple dans une démocratie s’exerce de deux façons :

  1. par le contrôle des élus sur le gouvernement ;
  2. par le contrôle des électeurs sur les élus.

- Le contrôle du parlement sur le gouvernement, sur les ministres, sur les hauts fonctionnaires était insuffisant
- L’examen du budget par la commission des finances de la Chambre, seul contrôle détaillé possible de l’activité ministérielle, était devenu une fiction, une illusion (dépôt des propositions en retard de plusieurs mois, hâte de l’examen, refus des ministres de répondre àmaintes questions, petit nombre des rapporteurs indépendants et consciencieux, etc...). Les parlementaires ne savaient rien de l’état réel des préparatifs militaires ; on a pu dire qu’ils en savaient cent fois moins que le service de renseignements allemand.

- Le contrôle du peuple sur le parlement était insuffisant
- En 1936, la majorité des députés est élue sur la base d’un programme qui comportait dans le domaine de la politique extérieure le principe de la sécurité collective et de l’assistance mutuelle, le soutien des nations victimes des agressions nazies, le développement du pacte franco-soviétique. Cette majorité (àl’exception du bloc des élus communistes) a laissé saboter la sécurité collective ; elle a approuvé le traité de capitulation de Munich ; elle a toléré qu’un G. Bonnet défende, au sein même du gouvernement, une politique pro-hitlérienne ; elle a favorisé une tactique de rupture progressive avec l’URSS. Toute politique contraire sans doute àl’intérêt national, mais aussi aux engagements pris devant les électeurs. Tout cela s’explique parce que ces députés n’étaient jamais obligés de rendre des comptes, sauf pendant les périodes de réélection générale que les représentants n’affrontaient qu’avec de nouvelles promesses et après quelques démonstrations démagogiques àla Chambre.
- Donc, communistes français, nous sommes fiers que notre pays ait été le premier àlancer dans le monde les grands principes qui définissent un régime démocratique, mais nous constatons que, par suite de l’ingérence des trusts dans la vie politique et dans la vie sociale, que par suite de l’insuffisance du contrôle populaire, la démocratie française n’assurait pas le pouvoir au peuple, mais dans l’essentiel aux trusts.
- Cette situation contribuait àdiscréditer l’idée démocratique et de ce fait favorisait le fascisme.

LE FASCISME

- Les causes du fascisme
- Il peut arriver un moment où les trusts ne parviennent plus en tournant la démocratie àmaintenir leur domination. Ils cherchent àbriser la démocratie pour instaurer la dictature fasciste. C’est une minorité capitaliste, la plus rétrograde, qui organise, finance et dirige le mouvement et les organisations fascistes. En Allemagne, sans les subsides des trusts, l’hitlérisme n’aurait pu se développer. Ce sont les trusts qui ont fourni àHitler les moyens financiers nécessaires àses campagnes. Ceci est important àretenir, parce que pendant longtemps de fausses théories conciliatrices ont circulé au sujet du fascisme. Les uns, certains théoriciens social-démocrates, tentaient d’affaiblir l’énergie des masses et justifiaient le fascisme en déclarant qu’après tout c’était peut-être une étape inévitable de l’histoire humaine. D’autres atténuaient les horreurs de la dictature fasciste, prétendant qu’il valait mieux la subir qu’engager la lutte contre elle, ce sont les munichois qui lançaient le slogan : plutôt la servitude que la mort ! D’autres enfin essayaient de diviser le peuple qui se dressait tout entier contre le fascisme ; ils affectaient de voir dans le fascisme, non une dictature terroriste des forbans, des trusts aspirant au pillage sanglant du bien d’autrui, mais l’avènement de la petite bourgeoisie exaspérée et comme enragée par la crise économique.
- Autant de théories qui ont été combattues par les communistes français. Ce sont les communistes qui, les premiers, ont vu clair, qui ont dénoncé les liens qui existaient entre le fascisme et les trusts et qui ont caractérisé le fascisme comme la dictature des éléments les plus réactionnaires du capital financier.

- L’état fasciste
- L’exemple de l’Allemagne hitlérienne révèle parfaitement la nature de l’état fasciste.
- Nous insisterons sur deux traits essentiels :

  • C’est une dictature exaspérée des trusts.
  • Le fascisme réalise un nouveau type d’état s’appuyant ouvertement sur la violence, la contrainte et la corruption.
    • Thèses du 6è congrès de l’internationale communiste

- Par exemple, en Allemagne, le fascisme a totalement détruit la liberté. Pour délit d’opinion, des communistes, des socialistes, des démocrates, des chrétiens, ont été livrés au camp de concentration et àla hache du bourreau.
- Les libertés démocratiques ont été supprimées. Les organisations populaires dissoutes, la liberté de la presse, la liberté de réunion abolies, les Å“uvres des plus grands parmi les penseurs et les savants jetées au feu.
- Les trusts ont pu systématiquement développer leur plan d’asservissement social et économique : réductions de salaires pour les ouvriers, disparitions des petites entreprises dans l’industrie et le commerce au profit direct d’une minorité de gros possédants, ruine de la petite et moyenne paysannerie dominée par un petit nombre de grands propriétaires fonciers.

- La démagogie fasciste
- Le fascisme aurait été un faible danger s’il s’était présenté sous son véritable jour, car le peuple entier s’en serait écarté avec horreur. Non. Le fascisme était dangereux parce qu’il cachait ses buts. Il se livrait àune démagogie éhontée pour tromper le peuple. Il se servait des fonds que les trusts lui prodiguaient non seulement pour créer et armer des troupes de choc, mais aussi pour organiser une propagande habile en vue de gagner les masses.
- Il se prétendait national, alors qu’il tournait le dos aux traditions authentiques de la nation, alors qu’il conduisait son pays àla catastrophe (Allemagne), alors qu’il entendait le livrer àl’étranger (France).
- Il se prétendait populaire, alors que le peuple n’a jamais été moins libre et plus malheureux que sous la dictature fasciste.
- Il se prétendait socialiste, alors qu’il était, contre l’ouvrier, l’instrument du grand capital et qu’il portait au plus haut point l’exploitation de l’homme par l’homme.
- Les communistes ont enlevé au fascisme son masque et ont révélé son véritable visage.

- Les trusts contre la France pour le fascisme
- Les trusts avaient projeté d’asservir la France. Dès le 6 février 1934 leurs agents utilisent le scandale Stavisky qui éclaboussait certains politiciens corrompus et donnent l’assaut àla République. Depuis lors les ligues fascistes se sont multipliées et sous des visages divers poursuivaient le même but : l’instauration d’une dictature fasciste sur notre pays. Sous cette forme, ce projet échoua. Il échoua devant la réaction du peuple français àla tête duquel se placèrent les communistes :

  • Manifestation du 9 février 1934 au cours de laquelle plusieurs communistes furent tués pour la cause de la liberté.
  • Grève générale du 12 février 1934.
  • Etablissement de l’unité d’action au sein de la classe ouvrière qui devait aboutir au pacte d’unité d’action du 27 juillet 1934 entre le parti communiste et le parti socialiste.
  • Unité syndicale (1935).
  • Fondation, sur l’initiative des communistes français, du Front populaire, alliance profonde de la classe ouvrière et des classes moyennes (14 juillet 1935).
  • L’union de la nation qui, dépassant le Front populaire et s’orientant vers le Front français, rassemblait notre peuple (8è congrès du parti communiste, 22-25 janvier 1937).

- La volonté de défendre la liberté affirmée par tout un peuple contraignait àreculer les agents de la cinquième colonne qui avaient voulu instaurer le fascisme de l’intérieur en utilisant leurs mercenaires et aussi des Français sincères qui, bientôt désabusés, écoutaient les appels àl’union que lançait au nom du parti communiste son secrétaire général Maurice Thorez.
- Dès lors, après avoir échoué de l’intérieur, les trusts tentaient de réaliser leur plan de l’extérieur. C’est la grande trahison des trusts commentée dans les deux premières brochures :
- Sabotage du redressement militaire.
- Mise au pas de notre politique étrangère : non-intervention en Espagne, complaisance devant le réarmement de l’Allemagne, agenouillement de Munich, campagne contre le rapprochement franco-soviétique.
- Préparation et organisation de l’invasion hitlérienne en France, invasion qui devait de l’extérieur obtenir le résultat qui n’avait pu être obtenu de l’intérieur.

- Â« L’Etat français », Pétain et Laval, création étrangère au service du fascisme hitlérien
- C’était donc le triomphe provisoire des trusts sans patrie fourriers du fascisme. L’analyse de la politique « vichyssoise » ne laisse aucun doute sur la nature de ce régime, imitation servile du modèle hitlérien.

  • Suppression des libertés démocratiques.
  • Mainmise des trusts sur l’économie du pays.
  • Démagogie sociale qui tentait de dissimuler sous des déclarations paternalistes la pire exploitation des masses populaires.
  • Démagogie « Ã la vertu » qui tentait de dissimuler sous des discours doucereux et des hommages rendus àl’honneur une corruption telle que jamais notre pays n’en avait connu une aussi profonde.
  • Démagogie « nationale » qui tentait, en mettant en avant le mot sacré de « patrie », de dissimuler l’abandon àl’étranger des principales richesses françaises.

- Que ce régime n’ait eu aucune base sociale, qu’il n’ait « duré » que grâce aux baïonnettes de l’étranger, c’est un fait évident quand on songe àla rapidité avec laquelle il s’est évanoui lors de la défaite hitlérienne. Né d’une victoire hitlérienne que les trusts avaient préparée, le prétendu Etat français s’est effondré après les premiers grands échecs de l’armée hitlérienne.

- La position du parti communiste français
- Armés de cette doctrine vivante qu’est le marxisme-léninisme, les communistes français ont agi en hommes essentiellement réalistes, éclairés qu’ils étaient par leur théorie de l’état.

  1. Ils ont décelé le danger immédiat ;
  2. ils ont énoncé en termes clairs le problème essentiel du moment : démocratie ou fascisme ;
  • Ils ont passé àla lutte pour la démocratie contre le fascisme.

- Ce rappel nécessaire contribuera àl’éducation de nos nouveaux adhérents.

- Les communistes ont décelé le danger immédiat
- Relisons ce passage du discours de Maurice Thorez au 6è congrès du parti communiste. Bien que vieux de sept ans, il conserve toute son actualité :
- La victoire du fascisme en France, ce serait l’écrasement économique et politique des masses laborieuses. Ce serait pour les ouvriers des salaires de famine, la suppression de leurs maigres lois sociales, l’interdiction de toute résistance àl’offensive économique du capital et de l’emploi de la grève, la destruction de nos syndicats, la dispersion ou la mise au pas de nos coopératives ; pour les fonctionnaires, ce serait les traitements réduits ànéant, les licenciements, le caporalisme outrancier des administrations. La victoire du fascisme, ce serait les boutiquiers, les artisans livrés sans défense àl’exploitation du grand capital, des propriétaires, des trusts, des compagnies de transport ; de M. Mercier, de l’électricité ; de M. de Wendel, du Comité des forges ; ce serait les paysans sacrifiés aux intérêts, aux privilèges des capitalistes monopolisateurs, des financiers, la ruine complète de leurs entreprises. Ce serait les intellectuels brimés. Déjàles plus grands savants, comme Perrin, Langevin, subissent d’odieuses attaques. Les professeurs sont attaqués vilement et bassement par les bandes fascistes. Ce serait, àl’exemple de l’Allemagne hitlérienne, les autodafés moyenâgeux, la suppression de toutes les libertés, la terreur sanglante, la population totalement asservie, les militants de la classe ouvrière emprisonnés, assassinés ; les communistes, les socialistes, les républicains et les démocrates frappés par le fascisme ! Ce serait la catastrophe pour le pays, la réaction renforcée en Europe. Ce serait la guerre entre les peuples et l’agression contre l’Union soviétique...

- Le problème du moment
- Depuis la menace fasciste, les communistes français ont pris sur le problème de l’état en France une position claire et sans équivoque. Dans la période considérée, la question qui se posait en France n’était pas : démocratie bourgeoise ou pouvoir du peuple. Elle était : démocratie bourgeoise ou fascisme.
- Fallait-il conserver et consolider les libertés actuelles, la République démocratique ou bien, sous le prétexte que notre idéal allait jusqu’au communisme par le socialisme, laisser passer le fascisme destructeur de toute liberté ?
- A cette question précise, les communistes ont répondu qu’il fallait tout faire pour conserver et élargir les libertés, pour épargner ànotre pays la honte et l’horreur du fascisme.
- A ceux qui prétendaient que la lutte pour la démocratie détournait les communistes de la lutte pour leur idéal, ils ont riposté en évoquant ce passage de Lénine :
- Ce serait une grave erreur de croire que la lutte pour la démocratie soit capable de détourner le prolétariat de la révolution socialiste ou de la masquer, de la voiler, etc... Au contraire, de même qu’est impossible un socialisme victorieux ne réalisant pas la démocratie complète, de même le prolétariat qui ne mène pas une lutte ample, conséquente et révolutionnaire pour la démocratie ne peut se préparer àvaincre la bourgeoisie...

- La lutte pour la démocratie contre le fascisme
- Les communistes ont étudié les raisons pour lesquelles le fascisme hitlérien avait triomphé et ils ont tiré de cette analyse des leçons efficaces. Ils ont combattu pour une politique conséquente de défense de la démocratie :

  • Unité de la classe ouvrière.
  • Union de la classe ouvrière et des classes moyennes.
  • Union de la nation française.
  • Lutte contre l’idéologie du fascisme et dénonciation de ses liens avec les trusts.
  • Soutien de toutes les revendications populaires pour réduire ànéant toute propagande démagogique du fascisme.
  • Dissolution des organisations fascistes.
  • Démocratisation de l’armée, des grandes administrations où devrait passer le soufle républicain.

- Ainsi, le mérite historique des communistes français a été clairement démontré par l’expérience. Ils avaient, dès l’apparition du fascisme, sonné le rassemblement de la nation française et indiqué comment le fascisme pouvait être vaincu. Cette clairvoyance que personne ne peut discuter - et qui est due, répétons-le sans cesse, ànotre doctrine marxiste-léniniste, - nous donne aujourd’hui une autorité accrue quand nous indiquons les conditions de la lutte pour une démocratie réelle.

LA LUTTE POUR UNE DÉMOCRATIE RÉELLE

- Le fascisme hitlérien est maintenant sur le chemin de la défaite. Le peuple français doit résoudre les grands problèmes que pose l’organisation politique de la France. Il ne suffit pas en effet de reconquérir la liberté. Pour ne pas risquer de la perdre de nouveau, il faut l’organiser sur des bases solides.
Quelles sont donc d’abord les conditions d’une démocratie réelle pour laquelle nous luttons ?

  • a)Sans la suppression des trusts, il ne peut y avoir de démocratie réelle. Nous avons montré comment les trusts avaient fait obstacle àla traduction dans les faits des principes démocratiques. Et si les trusts n’étaient pas supprimés, ils tenteraient d’imposer un fascisme nouveau àla place de celui d’Hitler, et de toutes façons, ils s’opposeraient àtoute construction d’une véritable démocratie comme àtoute renaissance de la France. A qui en douterait, il suffirait de jeter un coup d’Å“il sur l’expérience algérienne. Les trusts n’ont pas été supprimés. Non seulement leurs biens n’ont pas été confisqués, mais encore leurs agents ont l’oreille de certains commissaires du gouvernement. Résultat : il n’y a pas de démocratie réelle parce que les coups décisifs n’ont pas été portés àces quatre piliers que sont en Afrique du nord : les mines, les phosphates, la Banque et la féodalité foncière.
  • b)Sans contrôle du peuple sur ses élus, il ne peut y avoir de démocratie réelle. Nous avons souligné dans notre étude de l’état français quelles avaient été les conséquences désastreuses de cette absence de contrôle. La grande réforme àréaliser, ce sera donc le contrôle permanent des mandants sur les mandataires. De même que les parlementaires sanctionnent l’échec ou l’infidélité des ministres en les renversant, de même les électeurs doivent pouvoir sanctionner l’incapacité ou le reniement des parlementaires par la révocation du mandat àeux confié. On connait l’objection : mais alors, c’est l’instabilité gouvernementale. Non, car les élus, qui se sentiront surveillés, attacheront du prix àl’observation des engagements contractés envers la nation, ils se laisseront moins souvent prendre en défaut.

- Par ailleurs, quand l’électeur élira toujours un député pour l’application d’un programme - programme qui n’enchaine pas l’élu, qui ne tue pas en lui l’esprit d’initiative, - l’élément doctrine, organisation, discipline, prendra forcément une importance toute nouvelle dans la vie des groupes parlementaires et des partis ; la vie politique du pays, par le fait même, gagnera beaucoup en sérieux et en profondeur, dans le même temps que les majorités parlementaires et les cabinets ministériels deviendront automatiquement plus stables.

- Propositions du parti communiste
- Dès l’automne 1943, le comité central de notre parti a formulé sur l’avenir de la démocratie française des propositions concrètes qui peuvent se résumer ainsi :
- En l’absence du contrôle effectif et efficace assuré par la nation, les puissances d’argent ont pu fausser la démocratie, corrompre les hommes politiques, contrecarrer la volonté du suffrage universel, provoquer une véritable dégénérescence de la République.
- Le remède consiste donc non dans l’abolition de la démocratie, mais dans son perfectionnement, dans son élargissement, ce qui suppose :

  • Le contrôle des élus. Chaque député est tenu de rendre compte aux électeurs de son travail et du travail du parlement, et il peut être révoqué àtout moment sur pétition adressée au parlement par des électeurs régulièrement inscrits et ayant pris part au dernier scrutin, les pétitionnaires devant être en nombre supérieur au chiffre des voix obtenu par l’élu. La révocation est constatée par le bureau du parlement.
  • La transformation de l’armée de façon qu’elle fasse corps avec la nation.
  • La mise en pratique des principales libertés démocratiques :
    • Liberté de conscience pour tous, croyants et laïcs.
    • Liberté de la presse.
    • Liberté d’association et de réunion.
    • Inviolabilité du domicile et secret de la correspondance.
    • Respect de la personne humaine
    • Egalité de tous devant la loi.

- Cependant, une démocratie ne saurait être complète si àces droits politiques ne s’ajoutaient pas certains droits sociaux essentiels, comme le droit au travail et au repos, le droit pour tous les travailleurs de bénéficier d’assurances sociales àla charge de l’état, couvrant tous les risques d’accidents et de maladies, accordant une retraite suffisante aux vieux travailleurs, le droit d’instruction pour tous.
- Tous les Français et toutes les Françaises doivent bénéficier de ces libertés politiques et sociales. Celles-ci ne doivent comporter qu’une exclusion : celle des ennemis de la nation. Ceux qui se sont rendus coupables d’intelligence avec l’ennemi se sont exclus de la communauté française. Ils ne sauraient être admis àbénéficier des libertés dont ils ont voulu, avec l’aide d’un ennemi barbare, priver àjamais le peuple français, et leurs biens doivent revenir àla collectivité nationale qu’ils ont trahie.
- Ajoutons enfin une revendication démocratique essentielle : l’accession des indigènes des colonies la capacité politique, àla citoyenneté.
- Donc les communistes français, qui ont confiance dans le génie créateur d’un peuple àqui l’histoire doit les Communes du moyen âge, les sociétés populaires de 1793, la Commune parisienne de 1871 et les comités de libération de 1944, ont formulé en toute clarté les conditions indispensables àla création d’une véritable République.
- C’est précisément parce qu’ils luttent dans le même temps pour un relèvement du pays et une démocratie que les communistes ont revendiqué leur place dans le Gouvernement provisoire de la République.

- Le parti communiste et la participation au gouvernement
- A l’heure où cette brochure est rédigée, les communistes français ont deux représentants dans le Gouvernement provisoire de la République. Dès le 3 décembre 1943, dans l’Humanité, notre camarade Jacques Duclos a précisé que l’entrée des communistes dans le gouvernement revêtait une signification précise, àsavoir l’application ferme et résolue de mesures tendant :

  1. àla mise en Å“uvre de tous les moyens de l’empire et de la France pour la guerre, àla formation d’une armée antihitlérienne puissante et àl’armement des patriotes ;
  2. au châtiment exemplaire de tous les traîtres déjàentre les mains du Comité français de libération nationale et àl’épuration énergique des administrations publiques des éléments de la cinquième colonne hitlérienne ;
  3. au développement d’une politique démocratique et sociale galvanisant toutes les énergies françaises et créant l’enthousiasme pour la participation de tous àla guerre libératrice ;
  4. àpratiquer une politique d’union de la plus grande France par la compréhension et la satisfaction des légitimes revendications des masses indigènes ;
  5. àl’accroissement du rôle de la France dans le bloc des nations unies sur la base de l’indépendance de notre pays et de la restauration de sa grandeur par le développement au maximum de la participation des Français àla lutte commune des Alliés.

- Ainsi, notre parti ne participe pas pour participer. Il définit un programme et accepte de prendre part au gouvernement pour entamer la réalisation du programme. Mais il est bien clair que les communistes ne sauraient être responsables d’actes commis par ce gouvernement et qui seraient contraires au programme sur la base duquel ils sont entrés dans le gouvernement.

LA DÉMOCRATIE SOVIÉTIQUE

- Dans les brochures précédentes, il a été démontré que la suppression indispensable des trusts n’était pas le socialisme. La démocratie pour laquelle les communistes luttent àl’heure présente, celle dont ils ont défini les conditions, ce n’est pas non plus la démocratie socialiste. C’est ce que l’exemple de la démocratie soviétique montre parfaitement.

- La démocratie soviétique est un type d’état nouveau
- Il correspond àune économie socialiste. Rappelons que l’économie socialiste est caractérisée par la disparition de la contradiction capitaliste entre la production collective et la propriété privée des moyens de production. Elle est caractérisée aussi par l’abolition de l’exploitation de l’homme par l’homme.

- L’état est nécessaire dans la période de construction du socialisme
- En effet - et nous résumons une analyse célèbre de Staline (Les Principes du Léninisme) - cet état a trois tâches principales àaccomplir :

  1. Il doit d’abord briser la résistance des propriétaires fonciers et des capitalistes renversés et expropriés par la révolution socialiste, liquider leurs tentatives de tout genre et de tout ordre. La minorité capitaliste dépossédée dispose encore de forces considérables. Elle peut s’appuyer sur l’étranger avec lequel elle pactise (nous connaissons nos trusts sans patrie et, dès lors, nous comprenons mieux ce que Staline veut dire). Dans le pays même qui construit le socialisme et tant que le capitalisme n’est pas totalement détruit, elle possède encore des relations, des soutiens et tente par tous les moyens de faire obstacle àla construction du socialisme.
  2. Il doit ensuite organiser l’édification en rassemblant le peuple entier autour de la classe ouvrière, éduquer les masses populaires et orienter ce travail de façon àpréparer la liquidation, la suppression des classes.
  3. Il doit organiser une puissante force armée pour la lutte contre les ennemis de l’extérieur et sauvegarder ainsi les conquêtes de la révolution socialiste.

- Cet état a trouvé son expression dans les soviets. Les soviets (mot russe qui signifie simplement conseil) sont des organisations de masse qui sont nées dans la lutte ; elles sont des organisations directes des masses,
- c’est-à-dire les organisations les plus démocratiques et, partant, celles qui ont le plus d’autorité parmi les masses, qui leur facilitent au maximum la participation àl’organisation et àl’administration du nouvel état et qui libèrent au maximum l’énergie révolutionnaire, l’initiative, les facultés créatrices des masses en lutte pour la destruction de l’ancien système, en lutte pour l’instauration du système nouveau, prolétarien.

  • Staline, Les principes du léninisme

- C’est cet état qui constitue la dictature du prolétariat. Mais la dictature du prolétariat, c’est, d’après Lénine lui-même, l’alliance de la classe ouvrière et des classes moyennes contre les anciens exploiteurs,
- la démocratie pour l’immense majorité du peuple et la répression par la force de l’activité des exploiteurs, des oppresseurs des peuples.

  • Lénine, L’état et la Révolution

- L’état est nécessaire dans la société socialiste
- L’état est donc une nécessité dans la période transitoire qui va du capitalisme au socialisme. Il reste une nécessité àl’étape du socialisme. Dans une économie socialiste comme celle de l’URSS, il n’y a plus de catégorie sociale monopolisant la possession des moyens de production, partant plus d’exploitation de l’homme par l’homme. Les groupes sociaux ont été transformés. Il n’y a plus de prolétariat, mais une classe ouvrière qui possède les moyens de production en commun avec le peuple entier. (Staline) La paysannerie est affranchie de l’exploitation. Quant aux intellectuels, ils doivent servir le peuple parce qu’il n’existe plus de classes exploiteuses. A ce stade, cependant, l’état est nécessaire, d’abord parce que le pays du socialisme peut être entouré de pays dominés par les trusts et décidés àattaquer la république socialiste, ensuite parce qu’il subsiste encore àl’intérieur du pays du socialisme des débris des classes possédantes. Sans un état au service du peuple, les conquêtes révolutionnaires seraient compromises. Que serait devenue l’URSS en 1941 si ses dirigeants avaient écouté ceux qui disaient : « Maintenant que le socialisme est une réalité, supprimez l’état et l’armée » ?
- Mais si, dans la société socialiste, un état reste nécessaire, cet état a des caractéristiques telles qu’il devient l’état le plus démocratique du monde.

- Caractéristiques de l’état socialiste
- Ces caractéristiques ont été décrites par Staline dans le discours qu’il prononça en novembre 1936 au 8è congrès des Soviets.
- La Constitution soviétique s’appuie sur les fondements du socialisme
- Elle les reflète, elle les consacre par voie législative. Aucun droit n’est affirmé sans que les moyens d’en garantir l’application soient indiqués.
- Exemple :
- Article 118 : Les citoyens de l’URSS ont droit au travail, c’est-à-dire le droit de recevoir un emploi garanti, avec rémunération du travail selon sa quantité et sa qualité. Le droit au travail est assuré par l’organisation socialiste de l’économie nationale, par la croissance continue des forces productrices de la société soviétique, par l’élimination de la possibilité des crises économiques et par la liquidation du chômage. Il en est ainsi pour le droit au repos, le droit àl’assurance, le droit àl’instruction, etc...
La constitution soviétique part du principe que la différence de couleur ou de langue, de niveau culturel ou de niveau de développement étatique ne peut servir àjustifier l’inégalité de droits entre nations.
- Article 123 : L’égalité en droits des citoyens de l’URSS, sans distinction de nationalité ou de race, dans tous les domaines de la vie économique, publique, culturelle, sociale et politique, est une loi immuable.

- La constitution soviétique est caractérisée par son démocratisme conséquent et sans défaillance
- Le corps électoral se confond avec la nation. Les femmes comme les hommes, les jeunes (àpartir de dix-huit ans) comme les adultes, les soldats comme les civils ont le droit de prendre part aux élections des députés et d’être élus.
- Elle ne proclame pas simplement les libertés démocratiques, mais les garantit par voie législative avec des moyens matériels déterminés.
- Article 125 : Les droits des citoyens (aux libertés de parole, de presse, de réunion) sont assurés par la mise àla disposition des travailleurs et de leurs organisations des imprimeries, des stocks de papier, des édifices publics, des rues, des moyens de communications postales et électriques et autres conditions matérielles nécessaires àla réalisation de ces droits.
- Le contrôle du peuple est assuré :
- Article 142 : Chaque député est tenu de rendre compte aux électeurs de son travail et du travail du soviet de députés des travailleurs et peut être rappelé àtout moment par décision de la majorité des électeurs selon la procédure établie par la loi.

CONCLUSION

- Telle est donc la position des communistes français quant au problème de la démocratie française et de son avenir. Ils savent que l’état évolue sous l’influence de certaines conditions économiques et sociales et qu’àchaque époque historique correspond un problème particulier de l’état. Dans le moment présent, notre préoccupation essentielle est celle de la démocratie française.
- Nous ne pouvons, sans trahir la France, revenir àune situation comparable àcelle de 1939 où les trusts empêchaient l’application des principes démocratiques. Il faut créer les conditions d’une démocratie réelle. Les communistes savent que cette démocratie réelle ne sera pas la démocratie socialiste, mais qu’elle permettra ànotre pays de franchir, après la défaite du fascisme, la première étape du relèvement national. Notre réalisme ne nous fait pas oublier notre idéal final : la démocratie socialiste et la disparition même de l’état, quand seront réalisées les conditions que Lénine a définies ainsi :
- L’état ne pourra disparaître complètement que lorsque la société appliquera la règle : de chacun selon ses forces, àchacun selon ses besoins ; c’est-à-dire, lorsque les hommes se seront accoutumés àl’observation des règles fondamentales de la vie sociale et lorsque leur travail sera assez productif pour qu’ils le fournissent de leur plein gré selon leurs capacités... La répartition des produits n’exigera pas le rationnement de chacun par la société : chacun prendra librement selon ses besoins.

  • Lénine, L’état et la révolution

    Bibliographie

    - Lénine, L’état et la révolution (extraits)
    - Staline, Des principes du léninisme (chapitre 4)
    - Constitution de l’URSS
    - J. Duclos, La participation des communistes au Comité français de la Libération nationale (Cahiers 1944)
    - J. Duclos, La promotion par la libération de la France (Cahiers 1944)