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Les crimes de guerre sont imprescriptibles

correspondance avec le président de la République

et doivent le rester

mardi 29 juin 2010

- Le Collectif Maquis de Corrèze a adressé au président de la République une pétition portant de nombreuses signatures àl’appui de sa demande que l’imprescriptibilité des crimes de guerre soit enfin inscrite dans nos lois, alors que jusqu’àprésent, elle ne l’est que dans l’une des trois sources de notre droit.
- Voici la lettre par laquelle la présidence de la République a répondu au Collectif Maquis de Corrèze, suivie de la réponse que le président du Collectif vient d’adresser au président de la République :

Lettre de la présidence de la République

- Présidence de la République, Etat-Major Particulier
- Paris, le 22 juin 2010
- Monsieur le Président,
- Vous avez appelé l’attention de Monsieur le Président de la République sur le maintien de l’imprescriptibilité des crimes de guerre.
- Je dois vous faire savoir que Monsieur le ministre des Affaires étrangères et européennes a été, récemment, saisi par un parlementaire sur ce sujet.
- Une réponse de Monsieur le ministre publiée au Journal Officiel de l’Assemblée Nationale du 8 juin 2010 précise :
- Â« Le projet de loi adopté en première lecture au Sénat, le 10 juin 2008, est actuellement devant la commission des lois de l’Assemblée nationale et sera soumis àla discussion de l’Assemblée, dès que le calendrier le permettra. Sur le fond, ce projet de loi prévoit d’adapter le droit interne français afin de permettre la poursuite par les juridictions nationales des auteurs de crimes entrant dans le champ de la compétence de la Cour pénale internationale (CPI), en application du principe de complémentarité de juridiction prévu par le statut de Rome. Le texte, voté àl’unanimité au Sénat, prévoit que, lorsque la CPI décline sa propre compétence, les juridictions françaises ont la possibilité de s’y substituer, de façon qu’il soit possible de poursuivre les crimes contre l’humanité, les crimes ayant le caractère de génocide ou les crimes de guerre. Dès lors qu’il s’agit d’une proposition de substitution, un certain nombre de conditions ont été fixées, qui tiennent notamment àla résidence habituelle en France de la personne incriminée et àla circonstance que la qualification soit reconnue dans notre pays et dans le pays où le crime a été commis. Au-delàde la compétence des juridictions nationales, en toute hypothèse, un éventuel suspect présent sur le sol français pourrait toujours être interpellé, sur la base d’un mandat d’arrêt délivré par la Cour et remis àcelle-ci ou àtoute autre Etat revendiquant sa compétence aux fins de le juger. Le souci de lutte contre l’impunité est constant et la France ne sera pas un refuge pour de présumés criminels qui se seraient rendus coupables de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité. »
- Je vous prie d’agréer, Monsieur le Président, l’expression de mes sentiments distingués.
- Le commissaire en chef de la Marine Philippe Jacob
- Ã Monsieur Jean-Pierre Combe, Président délégué du Collectif Maquis de Corrèze

Réponse au président de la République

- Jean-Pierre Combe, président délégué du Collectif Maquis de Corrèze,
- Ã Monsieur le Président de la République, Etat-major particulier,
aux bons soins de monsieur le Commissaire en chef de la Marine Philippe Jacob
- Le 24 juin 2010
- Monsieur le Président de la République
- Je réponds par la présente àla lettre datée du 22 juin 2010, signée du Commissaire en chef de la Marine Philippe Jacob, par laquelle vous répondez aux pétitions que je vous avais adressées, et dont je vous remercie.
- Par cette lettre, vous portez àma connaissance une réponse faite le 8 juin 2010 par Monsieur le Ministre des Affaires étrangères et européennes àun parlementaire qui l’avait saisi au sujet du maintien de l’imprescriptibilité des crimes de guerre, que revendique le collectif Maquis de Corrèze dont j’ai l’honneur d’être le président délégué. Avant tout, je veux vous rappeler les raisons de notre revendication :
- Comme nos parents et grands-parents lors de la Libération de notre pays, nous jugeons inadmissible toute prescription des crimes de guerre, et toute tentative de les assimiler àdes crimes de droit commun nous révolte : appliquer une règle de prescription aux crimes de guerre, quel que soit le délai de cette prescription, est un acte qui assimile les crimes de guerre àdes crimes de droit commun.
- Or, outre qu’elle ne dit rien du délai de prescription inscrit dans la proposition de loi d’adaptation du droit français, la réponse du Ministre ne dit rien des fait suivants :
- La France a signé les conventions interalliées qui ont établi le Tribunal militaire international de Nuremberg et lui ont fixé sa mission : ces textes ne fixaient aux poursuites contre les criminels contre la paix, contre les criminels de guerre et contre les criminels contre l’humanité aucune limite dans le temps.
- Fondatrice de l’Organisation des Nations unies, la France a participé àl’élaboration des conventions des Nations unies qui reprenaient les conventions interalliées pour les faire valoir dans la paix ; elle a ensuite ratifié la convention du 12 aoà»t 1949 et adhéré àses protocoles additionnels, notamment au premier de ces protocoles, daté du 8 juin 1977 : en vertu de notre constitution, elle inscrivait ainsi cette convention et son premier protocole dans les sources du droit français, qui désormais, doit prendre en compte que les poursuites contre les crimes contre la paix, contre les crimes de guerre et contre les crimes contre l’humanité ne sont pas limitées dans le temps.
- Membre du Conseil de Sécurité de l’ONU, la France participé àl’élaboration de la convention adoptée par les Nations unies le 26 novembre 1968 ; or cette convention prend pour références les conventions interalliées fondatrices du Tribunal militaire international de Nuremberg pour déclarer imprescriptibles les crimes de guerre, quelle que soit la date où ils ont été commis ; ainsi rédigée, elle fixe en droit international l’interprétation de l’absence, dans les conventions interalliées, de limite dans le temps fixée aux poursuites contre les crimes de guerre : cette interprétation est que ces crimes sont imprescriptibles.
- Comment ne pas voir, comment nier que les conventions internationales que notre constitution définit comme la source internationale du droit français déclarent imprescriptibles les crimes de guerre, et cela sans interruption depuis les premières conventions interalliées ?
- Mais alors comment pourrions-nous admettre que notre droit dit « intérieur » soit en contradiction avec le droit international auquel nos tribunaux ont l’obligation constitutionnelle de se référer, et qui, lui, est juste sur ce point et répond favorablement àl’exigence de justice que notre peuple manifestait dans sa très grande majorité lors de la Libération de notre pays, et que de nombreux compatriotes manifestent encore aujourd’hui ? A la faveur de notre action pour l’imprescriptibilité des crimes de guerre, nous venons de constater que des électeurs de presque tous les partis politiques portent toujours ce souci de justice ! Comment des citoyens français pourraient-ils admettre que le droit français dit « interne » soit aussi clairement, aussi cyniquement injuste ?
- Vous comprendrez ainsi pourquoi les précisions embrouillées apportées par le Ministre des Affaires étrangères et européennes ne répondent de nulle manière ànos préoccupations ; mais il y a plus grave dans ces « précisions » : en y lisant que au-delàde la compétence des juridictions nationales, un suspect présent sur le sol français pourrait toujours être interpellé, sur la base d’un mandat d’arrêt délivré par la Cour (pénale internationale ?), nous ressentons que dans cette proposition se manifeste une tendance, elle aussi inadmissible, àla démission nationale ! Nous ne pouvons que rejeter la réponse du Ministre des Affaires étrangères et européennes.
- Ainsi, je vous confirme que pour toutes les raisons ci-dessus, nous ne pouvons admettre que, sous un prétexte ou sous un autre, soit votée en France une loi assignant aux crimes de guerre un délai de prescription, quel que soit ce délai.
- De plus, nous sommes informés de ce que des militants du Mouvement de la Paix, rassemblés àTulle àla fin du mois de mai en un Forum des Comités de paix, ont signé unanimement une pétition constatant que chaque fois qu’un crime de guerre est prescrit, chaque fois, la lutte pour élaborer la paix de l’avenir est entravée : cette pétition pose pour cette raison la même revendication que nous.
- Selon nous, l’Assemblée nationale devrait amender le projet de loi d’adaptation du droit français àla Cour pénale internationale qui va lui être présenté, en supprimant l’article qui assigne un délai de prescription aux crimes de guerre, et en adoptant un amendement tel que : « Les crimes de guerre, tels qu’ils sont définis par le protocole additionnel 1 du 8 juin 1977 aux Conventions de Genève du 12 aoà»t 1949, sont imprescriptibles quels que soient la date et le lieu auxquels ils ont été commis ».
- Un tel article résoudrait tous les problèmes qui se posent aujourd’hui dès lors que l’on refuse l’impunité, et rendrait inutiles les ratiocinations acrobatiques que nous présente le Ministre des Affaires étrangères et européennes.
- Recevez, Monsieur le Président, l’expression de notre haute considération.
- Jean-Pierre Combe, président délégué du Collectif Maquis de Corrèze.

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