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L’idéologie bourgeoise ment !

L’Humanité pouvait-elle être légale en aoà»t 1940 ?

réponse àla calomnie anticommuniste

jeudi 29 mars 2007, par Jean-Pierre Combe

- Monsieur Michel Onfray est connu pour avoir écrit plusieurs livres consacrés aux philosophies antiques que l’enseignement dispensé en France sous la garantie du gouvernement bourgeois maintient dans l’ombre et si possible dans l’oubli. Ce sujet appelle la sympathie sur cette Å“uvre : c’est l’un des traits de la prise de parti de son auteur en philosophie qui m’incitent àla lire ; l’autre est l’athéisme.
- C’est pourquoi le billet de mauvaise humeur qu’il a publié sur internet sous le titre « Coco, boulot, dodo » pour intervenir dans la campagne électorale me déçoit.

- Oh, tout philosophe est un citoyen comme les autres, et la politique est son droit : je ne lui reproche pas d’être l’un des premiers signataires du soutien àJosé Bové !
- Non ! Ce qui me déçoit, c’est que son billet « Coco, boulot, dodo » est un parfait produit de l’idéologie bourgeoise qui nous domine tous, alors que Michel Onfray a placé quelques thèmes importants de son Å“uvre philosophique au contraire de cette idéologie.
- Pourquoi n’a-t-il pas apporté àdéterminer son intervention politique autant de soin qu’il en apporte àson étude des philosophies antiques ? Cela lui aurait évité de reproduire plusieurs mensonges sortis de la vielle cuve de fermentation dans laquelle les diplomaties hitlérienne, mussolinienne et vaticane, dans l’entre-deux guerres mondiales, élevaient leurs bobards, et cela lui aurait évité quelque incohérence de grande taille !
- Car incohérence il y a, d’ailleurs assez comique : Michel Onfray met en effet dans le même sac de réprobation tout ce qu’il appelle « le PCF », aussi bien celui qui, notamment de 1936 à1945 et de Madrid àBerlin, a fait une guerre sans trêve au nazi-fascisme (qui s’appelait lui-même le racisme), que celui d’aujourd’hui, dont la direction, depuis Robert Hue et Marie-George Buffet, s’aligne sur les arguments de Michel Onfray pour condamner l’autre.
- Ainsi, Marie-George Buffet, après Robert Hue, peut bien condamner le PCF de 1939-1940 avec les mêmes arguments que Michel Onfray, elle ne trouve pas grâce àses yeux.
- Cohérence, où es-tu, cohérence ?
- Voyons maintenant quelques-uns des mensonges.
- Michel Onfray écrit :
- Le PCF n’a pas trahi les ouvriers, cher Maurice, quand, de conserve avec Maurice Thorez et Jacques Duclos, il négocie avec Otto Abetz en 1940 l’autorisation pour L’humanité de reparaître sous régime d’occupation nazie et que, pour ce faire, certains de ses émissaires jouent de la corde antisémite commune avec les nationaux-socialistes pour obtenir ce droit àrevenir dans les kiosques... La haine raciale du Juif chez les nazis effectue un trajet commun, sur le principe des compagnons de route, avec la haine marxiste des Juifs confiscateurs du grand Capital...
- Jean Ferrat a fait àMichel Onfray une réponse que je n’ai pas lue, mais àlaquelle celui-ci réagit par une lettre qu’il publie aussi sur internet ; dans cette lettre, il insiste, il en rajoute sur ce sujet, en écrivant :
- Parmi les actions de communistes qui ont fourni l’occasion de belles pages de l’histoire de France, il y a l’appel de Georges ( sic ) Tillon àrésister àl’occupation allemande dès le 17 juin 1940.
- Il y eut en effet Georges ( re-sic ) Tillon, certes, mais cet appel est celui d’un individu, communiste, bien sà»r, mais agissant seul, en son nom, et pas dans celui de son parti contre lequel il va car, officiellement, le PCF est toujours allié avec le III° Reich en vertu du pacte germano-soviétique signé le 23 aoà»t 1939, et ce pour dix années reconductibles... Làencore il faut opposer le génie personnel d’un communiste àl’appareil du parti qui, àcette époque, n’a pas fait de la résistance sa ligne officielle - ce qui adviendra après l’envahissement de l’URSS par les armées nazies... C’est de l’histoire, je n’y peux rien, pas de l’anticommunisme que de signaler que la motivation de Tillon est individuelle, et non d’affidé àun parti.
- Pendant ce temps, les carnets saisis par la police française sur Denise Ginollin, et contenant l’argumentaire de la négociation entre Maurice Tréand, responsable mandaté par le Parti, et Otto Abetz, lui-même représentant Ribbentrop, montrent que le « juif Mandel » et le « juif Reynaud », associés au grand capital, constituent des ennemis communs qui peuvent justifier qu’on s’entende sur leur dos...
- puis il demande àJean Ferrat :
- Avez-vous connaissance de cette épisode de l’Histoire de France et du parti ? Où sont donc les communistes ? Chez Georges ( re-re-sic ) Tillon ou chez Maurice Tréand, chez Guy Môcquet ou chez Denise Ginollin ? Plus chez l’un que l’autre ? Tout entier dans l’un, mais pas dans l’autre ? Quelles raisons justifient un droit d’inventaire avec l’oubli d’une moitié de l’histoire du parti ?
- Le texte de Michel Onfray qui suit cette troisième citation est un long développement qui surprend sous la plume d’un philosophe, par la confusion qu’il contribue àépaissir et par son constant recours àl’argument d’autorité !...
- Chers lecteurs, je vous invite àvérifier vous-même sur internet l’exactitude des citations ci-dessus, et en particulier le fait que la modification que j’ai introduite en caractères droits pour la commodité de la lecture ne change pas le sens des phrases citées ; prenez note aussi de ce que le Georges Tillon dont parle Michel Onfray est en vérité notre camarade Charles Tillon, dont le rôle fut éminent non seulement aux jours noirs de la débâcle et de l’« armistice », mais aussi pendant le combat clandestin et dans le printemps de la Libération.
- Des trois citations ci-dessus, la première est fausse et contient une vilenie ; elle est fausse pour deux raisons :

  • La première raison est que le groupe de direction du parti communiste français, en 1940, était éclaté en trois équipes, dont l’une était àParis, l’autre àBruxelles et la troisième àMoscou.
    - Maurice Tréand, qui a accepté d’entrer en contact avec Otto Abetz, était àParis, où il fut bientôt rejoint par Jacques Duclos, de retour de Bruxelles. Sur le sujet des contacts avec Otto Abetz et ses services, l’équipe parisienne n’était pas unanime, loin de là: Fernand Grenier, qui était membre du Comité central, contredit l’hypothèse de l’unanimité dans ses mémoires, publiées voici plusieurs décennies sous le titre C’était ainsi... D’autres témoignages font état d’une opposition catégorique de Gabriel Péri, lui aussi dirigeant du parti communiste français, député àla Chambre et journaliste àl’Humanité...
    - Quant àl’opinion des équipes de Bruxelles et de Moscou, le contenu des dépêches qu’elles ont échangées l’expose clairement négative, contraire àl’idée même d’une activité communiste légale et d’une reparution légale de l’Humanité dans les conditions de l’occupation nazi-fasciste (raciste) de notre pays.
    - Précisons encore que lors du dernier acte de la « négociation », les « négociateurs » communistes ont proposé àla censure allemande un article, rédigé par Jacques Duclos, que celle-ci ne pouvait pas laisser passer : c’est donc la rédaction de cet article qui marque la fin de ces « négociations ».
    - On le voit : il est faux de dire que Maurice Tréand ait été mandaté par le parti communiste pour prendre contact et pour négocier avec l’autorité nazie ; il est faux de dire que cette « négociation » a marqué une trève ou une tentative de trêve dans la guerre que les communistes faisaient au racisme (au nazi-fascisme).
  • Il faut en outre dénoncer une vilenie et la condamner : en effet, il n’y a pas de « haine marxiste des Juifs confiscateurs du grand capital » ; le marxisme ne reconnaît nulle confiscation du grand capital que les Juifs auraient opérée ! De plus, le marxisme ne hait pas : il étudie et prend parti ; sa prise de parti condamne l’appropriation privée du profit, la propriété privée du capital et la classe que forment les profiteurs de l’économie fondée sur cette propriété et sur cette appropriation ; mais parmi ces profiteurs, le marxisme ne fait pas de différence entre ceux dont la religion est le judaïsme, ceux dont la religion est telle ou telle variante du christianisme, ceux d’une autre religion et ceux qui disent n’avoir pas de religion : ils appartiennent tous àla classe des profiteurs du capitalisme, et la révolution a pour objet d’abolir les processus économiques et politiques qui maintiennent et renouvellent cette classe, quelle que soit la religion de ses membres.
    - Quant au parti communiste, je dois àla vérité de reprocher àMichel Onfray de ne pas savoir que pendant le début de la guerre, dont il parle, mais aussi pendant l’entre-deux guerres, pendant la guerre et plus tard, nombre des communistes, notamment de ceux qui ont pris rang dans les FTP pour combattre le racisme, portaient une culture juive, que certains d’entre eux avaient cette religion, et que nous honorons chacun d’eux comme nous honorons tous leurs camarades membres des FTP qu’ils aient eu de la religion ou qu’ils n’en aient pas eu !
  • La deuxième raison qui fait que la première citation ci-dessus est fausse est que dès 1920, le parti communiste français avait intégré dans son enseignement un siècle d’expérience du mouvement ouvrier revendicatif français : il enseignait àtous ses adhérents que selon toute vraisemblance, la répression bourgeoise les contraindrait un jour ou l’autre àla clandestinité.
    - Pour cette raison, le PCF instruisait ses militants de manière àles rendre capables de ne pas renoncer au communisme lorsque la clandestinité leur serait imposée : il le faisait en veillant àfaire connaître toute la séculaire culture populaire développée par la revendication de ceux qui ne possédant pas les machines, doivent vivre du travail de leurs mains ; dans la clandestinité, les ordres et directives descendent très mal, ou pas du tout, ou pire encore ; l’action du parti repose donc sur l’action des individus que sont les communistes ; Tillon et les autres étaient seuls, certes, et isolés, sans doute, mais il est faux de dire qu’ils n’agissaient pas au nom du parti : le parti, c’était eux tout autant que Grenier, Frachon, Duclos, Tréand, Clément, Thorez, Péri et les autres...

- Dans sa lettre àJean Ferrat, Michel Onfray, qui devine sans doute qu’il ne convainc guère, en rajoute encore ; il reprend àson compte une vieille calomnie dont la bourgeoisie française abreuve depuis fort longtemps ceux qui prennent le parti ouvrier dans la lutte des classes :
- Déjà, elle qualifiait Jean Jaurès d’agent de l’Allemagne ; aussitôt que fut créé le parti communiste français, elle n’a eu de cesse de le présenter comme un service extérieur d’on ne sait quel ministère soviétique ; prendre cette calomnie pour une vérité est évidemment la seule raison de croire ce que dit Michel Onfray, que la signature de Molotov au bas du pacte de non-agression engagerait le parti communiste français dans une alliance avec le troisième Reich ; or, toute l’histoire de France, toute l’histoire de l’internationale communiste, toute l’histoire du parti communiste français démentent cette thèse ! De plus, l’histoire de France et celle d’Allemagne disqualifient totalement les bourgeoisies de ces pays pour juger quelque parti communiste que ce soit.
- A Moscou, en vérité, l’interlocuteur du parti communiste français n’était pas le gouvernement soviétique, mais l’internationale communiste, qui n’était pas une administration d’on ne sait quel ministère du gouvernement soviétique : l’internationale communiste, c’était une assemblée de représentants de tous les partis communistes, dont la fonction était de produire des évaluations d’ensemble de la lutte des classes au niveau mondial, et de les diffuser àtous les partis membres ; ce n’est pas làune fonction administrative, ni une fonction qu’un gouvernement quel qu’il soit puisse contrôler.
- Non ! Ce que certains appellent « la négociation secrète » n’est pas un moment de la politique du parti ; ce n’est qu’une initiative malheureuse prise individuellement par quelques militants qui prenaient leurs illusions, soigneusement entretenues d’ailleurs par l’obsédante propagande bourgeoise, pour la réalité. Mais cette initiative tôt arrêtée par le parti, direction et militants unis, n’a pas influencé la politique du parti communiste français, ni en 1940, ni plus tard.
- Il faut encore remarquer que ni la police française, ni la police allemande ne s’y sont trompées, qui n’ont jamais fait la moindre pause dans leur chasse aux communistes !...
L’Humanité pouvait-elle reparaïtre légalement en aoà»t 1940 ?

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