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Des partis de pays neutres proposent que l’Internationale ouvrière recherche la paix

La SFIO et la guerre en 1915

La direction nationale est pour la guerre, la fédération de la Haute-Vienne contre

vendredi 8 juin 2007

Parti socialiste (S.F.I.O.)

Fédération de la Haute-Vienne

- Limoges, le 15 mai 1915
- Cher citoyen secrétaire,
- Saisie par une de ses sections de la question de l’attitude du parti socialiste au sujet de la guerre et des relations de la Commission administrative permanente avec les organismes fédéraux, la Fédération socialiste de la Haute-Vienne a estimé qu’il était de son devoir de se livrer àune consultation générale des Camarades membres du Parti de son département.
- Une réunion plénière des groupes de la Fédération a donc eu lieu le dimanche 9 mai, àLimoges, réunion àlaquelle de nombreux groupes ruraux étaient représentés.

- Après échange de vues, la réunion plénière a décidé d’adresser àla C.A.P., au Groupe parlementaire socialiste et aux Fédérations le rapport suivant.
- Nous vous serions obligés de vouloir bien le communiquer àvos membres et dans cette attente nous vous prions d’agréer, cher citoyen secrétaire, nos salutations socialistes.
- Le secrétaire fédéral,
Léon Berland.
- Prière de nous accuser réception

RAPPORT

- La Fédération de la Haute-Vienne du Parti socialiste, après examen de la situation générale créée par l’état de guerre, a résolu d’adresser àla Commission Administrative Permanente, au Groupe socialiste parlementaire et aux Fédérations un rapport résumant sa pensée et son jugement sur les évènements.
- La mobilisation a incontestablement jeté le plus grand trouble dans les organisations du Parti. Fédérations, sections et groupes ont été subitement privés d’un grand nombre de leurs éléments. Il en est résulté une notable diminution de l’activité et de la vitalité du socialisme français. D’autre part, il a fallu renoncer totalement, du fait de la guerre, aux formes habituelles et au caractère constant de la propagande et de la lutte.
- Mais tout en tenant compte, dans la plus large mesure, de ces considérations, on peut se demander si véritablement le nécessaire a été fait pour maintenir un rapport étroit, un contact utile entre les membres des organisations du Parti, de façon àmesurer, malgré les difficultés certaines qu’on y devait rencontrer, àla fois un maximum de vitalité et de cohésion de tous les camarades restés capables d’action et un maximum d’initiative, de participation et de contrôle de tous pour les décisions et les attitudes àprendre. Ainsi se serait dégagée malgré tout la pensée collective du Parti dont la C. A. P. et les organismes cebtraux avaient le devoir de s’inspirer.
- Certes, les Fédérations auraient pu faire montre de plus d’activité. Elles ne l’on pas fait. Elles ont eu tort.
- Mais il faut dire, àleur décharge, que conformément d’ailleurs àun usage courant, elles étaient en droit d’attendre une impulsion énergique de la part de ceux qui depuis neuf mois administrent et agissent en notre nom.
- En toute cordialité nous exprimons le regret que les amis de la C. A. P. n’aient pas mieux recherché les inspirations et les appréciations de ce qui restait de la France socialiste.
On est en droit de supposer que certaines attitudes eussent été légèrement différentes. En tous cas, ceux qui, de bonne foi, nous engageaient historiquement, au cours des tragiques évènements actuels, par des documents qui resteront, eussent été àcouvert.
- Mais sans plus récriminer sur le passé, nous voulons aborder la situation présente.
- Voici neuf mois de guerre écoulés et aucun résultat militaire décisif n’est intervenu d’aucun côté.
Ce que l’on sait bien, toutefois, c’est que chaque jour qui passe accumule des ruines nouvelles et aggrave très sérieusement les conditions dans lesquelles les prolétaires se trouveront au lendemain de la cessation des hostilités.
- Ce que l’on sait aussi, c’est que sans cesse des milliers de victimes tombent sans que la victoire, dans le sens où beaucoup l’entendent, apparaisse.
- Avec angoisse, nous évoquons l’état d’épuisement et de ruines où sera plongé notre pays si la guerre se prolonge des mois encore.
- Ainsi nous sommes amenés àsouhaiter, dans l’intérêt du socialisme, de la classe ouvrière et de notre patrie, la fin de la guerre.
- Bien entendu, nous ne réclamons pas la paix àtout prix. Nous ne proposons pas, par exemple, d’abandonner la Belgique et les régions françaises envahies aux occupants.
- Nous avons au coeur, autant que quiconque, le légitime souci de notre indépendance et de notre dignité nationales.
- Mais nous ne pensons pas que ce soit le rôle du Parti socialiste de pousser àla guerre àoutrance, d’adopter une allure belliqueuse et de fermer les oreilles àtoute rumeur de paix.
Nous ne pensons pas que ce soit son rôle, àla proposition de socialistes étrangers de convoquer en congrès les sections des pays neutres de l’Internationale et de provoquer une réunion plénière du B. S. I. de répondre par ces mots :

  • Représentant un parti dont la nation est belligérante, la C. A. P. laisse aux sections des pays neutres le soin de juger si une réunion de leur part présente en ce moment le caractère de l’opportunité et de l’utilité.
    - Relativement àune réunion du Bureau socialiste international, la C. A. P. se prononce ànouveau très fermement pour la négative, une telle réunion, dans les circonstances actuelles, n’est pas possible matériellement et n’est pas souhaitable moralement. Comme la C. A. P. l’a déjàformulé, sa tenue irait àl’encontre même du but que peuvent se proposer ses partisans les mieux intentionnés.

- Même si nous ne nous trouvons pas, comme Français sinon comme socialistes, tous satisfaits de l’attitude passée de certains socialistes des pays neutres, nous jugeons que ce n’est pas une raison suffisante pour décourager par avance les efforts de ceux qui voudraient hâter la paix en Europe et qui, un peu tardivement - c’est surtout le reproche qu’on peut leur faire - veulent respecter les décisions de nos congrès internationaux.
- La résolution du congrès international de Stuttgart, en 1907, demandait aux classes ouvrières des pays concernés, àleurs représentants dans les Parlements, aidés du B. S. I. si une guerre éclatait de s’entremettre pour la faire cesser promptement.
- Le congrès international de Bâle en 1912, sur le même sujet, précisait mieux encore :

  • L’Internationale redoublera d’efforts pour prévenir la guerre par sa propagande toujours plus intense, par sa protestation toujours plus ferme.
    - Le Congrès charge àcet effet le Bureau socialiste international de suivre les évènements avec un redoublement d’attention et de maintenir, QUOI Q’IL ADVIENNE, les communications et les liens entre les partis prolétariens de tous les pays.

- Opposer une fin de non-recevoir àceux qui ont pris au sérieux les résolutions de nos congrès internationaux, àla minute même où ils tentent de s’y conformer, nous a paru regrettable.
- Plus regrettable encore nous ont paru les propos de militants considérés par l’opinion comme nos porte-paroles autorisés, qui, tantôt répondant àla campagne d’adversaires obstinés de la Classe ouvrière prononçaient, tout au moins de façon prématurée, la condamnation des socialistes allemands, atteignant ainsi l’Internationale, tantôt reprenant la formule "jusqu’au bout", entretenaient une équivoque dangereuse.
- Qu’entend-on par là?
- Veut-on refuser tout crédit àceux qui désireraient profiter de l’occasion possible de mettre fin aux hostilités par une paix honorable et proclamer qu’un traité avec l’Allemagne sera seulement àenvisager le jour où le peuple allemand aura fait un 4 Septembre, débarqué son Empereur et fondé une République ? Entend-on subordonner la paix àl’écrasement du militarisme allemand qui, comme tous les militarismes ne pourra disparaitre que par l’action des classes ouvrières s’exerçant dans le cadre national ? Se propose-t-on, d’autre part, de ne terminer la guerre que lorsqu’il sera possible d’imposer aux Empires du Centre de l’Europe la libération des nationalités qu’ils oppriment cependant que les pays alliés en maintiendraient d’autres en tutelle ?
- Cette façon de conditionner d’hypothèses, certes désirables mais tout-à-fait problématiques, les pourparlers de paix est jugée par nous inadmissible parce qu’elle ne tient pas assez compte des réalités de tous ordres et qu’elle s’écarte de la façon socialiste de concevoir en ces matières.
- Sommes-nous donc disposés àune paix humiliante, àune paix "coà»te que coà»te" ?
- Non, nous ne voulons pas aller "jusqu’au bout" non plus dans cette direction.
- Ce que nous désirons, nous le formulons en ces termes :

  • Que le Parti socialiste français n’ait pas, par la plume de quelques-uns des journalistes qui écrivent en son nom, un rôle tellement belliqueux et fanfaron qu’il frise le chauvinisme ;
    - Qu’il ne décourage ou ne désavoue aucune des tentatives qui pourront être faites par des sections socialistes d’autres pays pour rechercher les moyens d’en finir avec cette boucherie effroyable où coule àflots le sang des peuples innocents et victimes ;
    - Qu’il tende une oreille attentive àtoute proposition de paix d’où qu’elle vienne, étant entendu que l’intégrité territoriale de la Belgique et de la France ne saurait être contestée dans les bases de discussion ;
    - Que la C. A. P. s’efforce de rétablir des relations plus suivies et plus étroites entre les divers organismes du Parti afin qu’une participation àla vie intellectuelle du socialisme français et un contrôle plus actif sur la direction puissent être efficacement exercés par tous les camarades ;
    - Qu’enfin tout le Parti soit unanime àprotester contre les abus intolérables d’une censure empêchant àchaque instant l’expression de la pensée socialiste et les nécessaires répliques aux injures et aux provocations réactionnaires ; unanime aussi pour énergiquement réclamer la permanence du Parlement, l’étude immédiate et le vote rapide des propositions de lois consécutives aux évènements de la guerre, la recherche, dès maintenant, des conditions par lesquelles on procèdera aux efforts de relèvement économique et de développement social de notre pays plus menacé que tout autre par la prolongation de la guerre.

- Telles sont les réflexions que la Fédération socialiste de la Haute-Vienne croit devoir transmettre àla C. A. P., au groupe socialiste parlementaire et aux Fédérations. Elle le fait dans un esprit complet de camaraderie et de bienveillance, sans avoir la prétention de faire la leçon àqui que ce soit, désireuse seulement d’indiquer, selon ses vues, la direction qu’elle juge bonne pour que le socialisme de France puisse dans l’Histoire apparaitre comme un grand Parti, digne de sa Nation qu’il aime et défend, digne aussi de l’Internationale Ouvrière àlaquelle il entend, pendant comme après la guerre, rester fidèlement attaché.

  • 9 mai 1915, la Commission administrative :
    - André Arnoux ;
    - Léon Berland, conseiller municipal ;
    - Léon Betoulle, député, maire de Limoges ;
    - Albert Chauly ;
    - Achille Fèvre, conseiller général, adjoint au maire de Limoges ;
    - Emile Fougères, président du Conseil d’Arrondissement, conseiller municipal ;
    - Eugène Gaillard, adjoint au maire de Limoges ;
    - Louis Grandjean, conseiller municipal ;
    - Pierre Hébras, conseiller municipal ;
    - Jean Parvy, député, conseiller général ;
    - Henry Penot, conseiller municipal ;
    - Adrien Pressemane, député, conseiller général, conseiller municipal de Saint Léonard ;
    - Jean Rougerie, conseiller municipal ;
    - Henri Sarlangeas ;
    - Baptiste Sauve, conseiller municipal ;
    - Sabinus Valière, député, conseiller général, adjoint au maire de Limoges.
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