De quoi l’affaire DSK est-elle le nom ?
Car enfin, il est incroyablement irresponsable que le PS, qui s’apprêtait comme à son ordinaire à adouber le candidat désigné par les médias, ait pu miser sur un personnage qui avait tout pour « exploser en plein vol » pendant la campagne électorale : il ne s’agit pas seulement des comportements à risques que la droite et son extrême n’auraient pas manqué d’exploiter le moment venu, mais plus gravement encore des liens cyniquement affichés qu’entretenait l’ex-présidentiable « socialiste », non pas avec la gauche populaire politique et syndicale, mais avec l’oligarchie financière qui pilote la mondialisation capitaliste en écrasant sans pitié les pays contrevenants sous les coups de massue du FMI, de l’OMC (dirigée par un autre « socialiste »…) et, quand cela ne suffit pas, de l’OTAN et de son « droit d’ingérence » autoproclamé dans la « gouvernance » des Etats du sud. La pitoyable « affaire » du Sofitel ayant très provisoirement plongé la machine à décerveler dans une hébétude cacophonique, l’ascension social-médiatique d’un DSK, couplée à la candidature inévitable d’un « président » sortant en quête de paternité clinquante et en rupture de fraternité républicaine, apparaît dans toute son horreur avec, en position de libero verrouillant tout le système, la montée d’un parti fascisant héritier de Versailles, de Vichy et de l’OAS. Le peuple français sidéré est ainsi forcé, -pour le pire (mais pourquoi pas pour le meilleur, s’il sait en tirer leçon ?)-, de mesurer d’un seul coup d’œil sa déchéance politico-morale au miroir brisé que lui tend, bien malgré elle, une oligarchie d’Ancien Régime arc-boutée sur ce que la dé-civilisation capitaliste a de plus clinquant, de plus faisandé et de plus cynique.
France républicaine : tout doit disparaître !
Impossible désormais de nier le délitement d’une nation qui fut longtemps à la pointe du combat émancipateur : quand Marianne se réfléchit dans le second tour que lui programment ses élites pour suppléer DSK, qu’a-t-elle sous les yeux, comme la Reine de Blanche-Neige ? Peut-être le retour en force d’un Sarkozy arc-bouté sur sa puissance financiaro-médiatico-policière, et dont le bilan quinquennal dévastateur aura consisté à démanteler avec acharnement le programme du CNR, -comme l’en félicitait par avance le grand patron Denis Kessler dans un édito-choc de novembre 2007-… Peut-être, et sous forme de « moindre mal »Â (?) la victoire finale à l’arraché d’Aubry ou d’Hollande, qui rivalisent de fadeur popote sur la base d’un programme insipide qui s’inscrit clairement dans le cadre du plan « euro plus » qui ravage l’Europe de Madrid à Vilnius en passant par Paris : le règlement rubis sur l’ongle des « dettes souveraines » à ces financiers que les contribuables sauvèrent de la faillite en 2008 ; le sauvetage prioritaire de la monnaie unique quitte à désosser le dernier service public, à délocaliser la dernière usine, à araser la dernière conquête sociale obtenue en 36, 45, 68… Sans oublier tout ce qui constitue le programme commun inavoué des « grands candidats » de l’alternance-sans-alternative programmée pour 2012 : le rivetage d’une « euro-gouvernance » qui réduirait à rien la démocratie parlementaire puisque le budget de chaque Etat européen sera désormais visé par l’UE (sous le regard vigilant de Mme Merkel) avant d’être présenté aux élus ; la poursuite des campagnes néo-coloniales menées en Afghanistan ou en Libye, bientôt transformée de force en « démocratie » atlantico-dépendante ; le suicide euro-assisté de l’Etat-nation français au prix d’un arrachage linguistique géant qui substitue chaque jour un peu plus, dans le silence assourdissant des intellectuels, le Business Globish à la langue de Molière, de Sciences po au CAC 40, et des séminaires universitaires « branchés » au « bain linguistique en anglais » institué par Luc Chatel dès… la maternelle ! Enfin qui, parmi les « présidentiables » favoris des médias, ose remettre en cause le dogme totalitaire de l’UE s’auto-définissant comme une « économie de marché ouverte sur le monde où la concurrence est libre et non faussée » ? Un dogme qui force la gauche établie et une bonne partie de « l’extrême gauche » à farder aux couleurs de l’« internationalisme » et de l’« Europe sociale » les prédations des transnationales usant du libre-échange mondial pour briser la classe ouvrière, la fonction publique et l’agriculture paysanne. Le tout sous les vivat des bourgeois bohèmes rêvant de « décroissance » devant leurs claviers souples et importés dernier cri…
"Comme un couteau sans manche dont on a jeté la lame »…
Comment notre peuple, qui subit à répétition de tels viols économiques, politiques (comme le viol du « non » souverain à la constitution européenne, aussitôt remplacée par le Traité de Lisbonne) et culturels (par ex. le viol répété de la loi laïque de 1905 : voir le récent voyage à Rome de M. Fillon pour assister à la « béatification » d’un ancien Pape célèbre pour son anticommunisme et pour sa mansuétude envers les hiérarques d’extrême droite), pourrait-il ne pas ressentir un immense dégoà »t de soi, pris en tenailles qu’est notre pays entre l’image d’un DSK lynché tout cru, et l’attente dérisoire d’un « heureux évènement » présidentiel jumelé au pré-lancement de la campagne électorale ?
Comment ce pays malheureux, dont les fonctionnaires sont cloués au pilori, dont les ouvriers d’usine se demandent chaque jour combien de temps les sépare de la délocalisation et du RSA, dont les jeunes ingénieurs s’expatrient au rythme de la désindustrialisation, dont les chercheurs sont désormais payés « à la tâche », dont les représentants à l’eurovision sont priés de chanter dans toutes les langues possible sauf en français, dont les salariés ont durement lutté pendant trois mois sans que les confédérations syndicales euro-formatées envisagent jamais d’appeler à « y aller tous ensemble et en même temps », comment un tel pays aux portes de la dépression politique pourrait-il ne pas finir par se mépriser lui-même à force de se faire traiter par ses « élites » d’hexagonal, de franco-français, de gréviculteur, de franchouillard, de laïcard, de cartésien attardé, et pis que tout, de jacobin non repenti ? Comment ne constaterait-il pas, que la France qu’il continue d’aimer en secret ressemble de plus en plus au couteau sans manche dont on a jeté la lame, que raillait jadis l’humoriste, sans qu’aucun parti de la gauche établie ne lui donne de perspective claire pour construire la résistance et organiser la contre-attaque ? Dans sa diversité, notre peuple attend Jeanne d’Arc ou Robespierre, Louise Michel ou Manouchian, De Gaulle ou Jean Moulin, Ambroise Croizat ou Jean-Paul Sartre… et il a, excusez du trop, Carla Bruni et Jack Lang, Borloo et Cohn-Bendit, avec en constante fond subliminal… l’omniprésente « Marine » présente comme il se doit à l’embouchure de tous les fleuves de nos désespérances !
La xénophobie d’Etat comme face cachée de l’autophobie nationale… et réciproquement !
Bien entendu, nos élites savent parfaitement qu’elles ne pourront venir à bout du peuple des Sans-Culotte et des Communards sans diviser la classe laborieuse en dévoyant son légitime sentiment national dans l’impasse mortelle de l’islamophobie et du néo-colonialisme « françafricain » ; tel est le rôle de diversion à la casse nationale que joue la xénophobie d’Etat, cet avers pseudo-patriotique de l’autophobie nationale propagée par l’élite Globish Mother tongue ; et il y a complémentarité parfaite, si l’on se place du point de vue de l’oligarchie, entre l’euro-dissolution de la nation et le lancement à jet continu de leurres racistes peinturlurés de tricolore, dont le rôle est d’aider le matador maastrichtien à étourdir la vachette française lardée de banderilles maastrichtiennes pour lui porter l’estocade de l’« eurogouvernance » dont DSK se proposait d’être le principal héraut aux prochaines présidentielles…
Du cadenas de l’UMPS au super-verrou du « FNMI »
Comment s’étonner dès lors qu’une partie de la classe ouvrière, répudiée par ses partis historiques en mal de « mutation », qu’une partie de nation populaire inlassablement brocardée par les bobos, finisse par se tourner vers celle vers laquelle tout le dispositif politique pousse mécaniquement la population laborieuse pour éviter que l’explosion anti-Sarko et anti-UE qui monte ne prenne un tour de nature à inquiéter l’oligarchie : Marine Le Pen. Tel était le sens politique réel, insoupçonné de l’adhérent PS de base, de la nouvelle tenaille politique « Marine/DSK » qui, jusqu’au 15 mai, visait à compléter et à « doubler » le verrou rouillé de la bipolarisation PS/droite (60% d’abstentions aux cantonales, 25% des inscrits pour les « partis de gouvernement »…) par un super-cadenas politique flambant neuf et déjà à demi grippé : le « FNMI », dont les maîtres du capital vont devoir en urgence fournir une version rafraichie et moins « olé-olé »...Â
Que faire dans ces conditions pour rendre espoir et dignité à notre peuple amputé de son estime de soi par sa classe dominante irréversiblement moisie ?
Combattre la novlangue, partir des contenus de classe de l’alternative
La première condition pour construire l’alternative progressiste est d’en finir avec l’esprit collabo travesti en « modernité ». De la Mitterrandie à l’Euro-sarkoland, la pensée unique antimarxiste nous a appris à ringardiser ou à criminaliser tout ce qui peut évoquer, historiquement ou conceptuellement la lutte des classes, le socialisme, la classe ouvrière, la révolution, mais aussi la République, la nation populaire, les Lumières et jusqu’à l’idée de progrès social inlassablement identifié à « l’assistanat » et à  « l’Etat providence » ; dès l’école primaire, notre jeunesse biberonnée au Globiche est priée d’idolâtrer la « construction européenne » et d’encenser le « droit d’ingérence » d’une « communauté internationale » en croisade permanente contre « le terrorisme » des « Etats voyous ». Surtout, surtout pas d’interrogations sur le contenu de classe du nouvel ordre contre-révolutionnaire qui, sous les noms de « mondialisation » et d’ « intégration européenne », a fait main basse sur l’Europe depuis que la première expérience socialiste de l’histoire, taraudée par des contradictions irrésolues et par une croisade antisoviétique de chaque instant, a perdu la seconde guerre froide !
Pour un nouveau FMI (la France, pas sans la Marseillaise ni… l’Internationale !)
Il est donc urgent de réapprendre à réfléchir en termes matérialistes. Ainsi, au lieu d’opposer abstraitement « le » patriotisme à « l’ » internationalisme, la Marseillaise à l’Internationale et le drapeau tricolore aux drapeau rouge ainsi qu’à l’étendard « arc-en-ciel », il faut rappeler que, dans une société où le Travail est exploité par le Capital, le patriotisme républicain, -seul ciment possible pour qui veut associer les couches moyennes à la classe ouvrière pour vaincre l’oligarchie-, est l’allié naturel d’un nouvel internationalisme prolétarien ancré sur les résistances populaires grandissantes sur les cinq continents ; face à cette alliance progressiste, se trouvent les complices du nationalisme ethnique et du supranationalisme atlantique qui dessinent ensemble le hideux visage de la Grande Europe blanche des populismes ethniques.
L’UE, « en sortir » (par la porte à gauche !) ou… « y rester » ? Rompre avec l’UE pour un nouveau CNR, pour de nouveaux traités internationaux progressistes non limités à l’Europe
Car la véritable alternative ne consiste pas à choisir entre la xénophobie de l’UM’Pen et l’euro-béatitude suicidaire du PMU (Parti Maastrichtien Unique), version bleue ou rosâtre. C’est par la porte à gauche que la France doit sortir de cette prison des peuples qu’est l’UE ; car si elle n’en sort pas, elle y « restera ». Assez de ce trou noir dévoreur d’acquis qu’est l’euro gagé sur le deutsche Mark. Le but d’une rupture progressiste avec la désintégration européenne de notre pays ne serait sà »rement pas d’isoler la France, mais de stimuler toutes les luttes populaires en Europe et surtout, de mettre en place de nouveaux traités internationaux progressistes non limités à l’Europe à l’instar de ceux que construisent, en rupture avec le supranationalisme néolibéral made in Washington, les pays de l’ALBA regroupés autour de Cuba et du Venezuela ! En réalité, pour remettre le peuple à l’offensive, il faut l’appeler à prendre appui, non sur les sables mouvants d’une gauche DSKféinée, mais sur les principes d’antifascisme, d’indépendance nationale, de progrès social, de centralité du monde du travail, de nationalisation des entreprises stratégiques et de coopération internationale, qui inspirèrent le CNR et auxquels il convient d’ajouter le souci d’un développement industriel éco-compatible car piloté par et pour le peuple souverain. S’agissant de la classe ouvrière, il faut l’aider à reconstruire les outils politiques et syndicaux de classe qui lui permettront, dans sa diversité d’origines, de reconstruire l’alliance rouge et tricolore qui lui permit longtemps d’être un acteur central de la vie politique… avant que le PCF « dé-salinisé » de M. Laurent, nouveau président du « Parti de la Gauche Européenne », ne préférât rallier la défense à corps perdu de la monnaie unique tant combattue par Georges Marchais en 1992 !
Le négationnisme anticommuniste, arme de destruction massive contre les libertés démocratiques
De même, s’agissant des expériences socialistes engagées dans la foulée d’Octobre 1917, il y a bien autre chose à faire que de les amalgamer odieusement au nazisme en oubliant ce que nous devons tous aux héros de Stalingrad [2] et en rayant de nos mémoires le grand rêve humaniste qu’évoque encore le nom de Youri Gagarine. Il faut dresser le bilan objectif du socialisme réel, il faut oser parcourir des yeux la bibliothèque noire de l’ANTI-communisme, pour rouvrir la perspective d’un socialisme de nouvelle génération contrôlé de A à Z par les peuples.
Non la nation populaire n’a rien à voir avec ces « bons Français » bleu horizon ou bleu marine, qui oppriment les immigrés pour mieux liquider la « Douce France » chantée par Trenet en 1936. Ni avec les Muscadins en place qui « foutent » quotidiennement Marianne en attisant la guerre de religion, en faisant à coups de bombe la police des transnationales au sud de la Méditerranée, et en courtisant ces « bons Français » ô combien « assistés » qui planquent leurs milliards en Suisse pour échapper à l’impôt. « La nation c’est le peuple ! » expliquait le philosophe communiste Georges Politzer, fils d’immigré hongrois et patriote français, peu avant d’être torturé et fusillé par les nazis. Un mot qui faisait écho à la remarque profonde de Jean Jaurès, martyr du combat anti-impérialiste : « la souveraineté politique du peuple est le socle de l’émancipation sociale ». Alors face à l’extrême droite violeuse de république, face à un régime abhorré, minoritaire et illégitime, face à une UE violentant au quotidien du droit des peuples d’Europe à disposer d’eux-mêmes, que renaisse la « France des travailleurs » chantée par Ferrat, celle qui assume toujours, aux pires moments où le pays est tenté de faire le deuil de soi-même, l’article 35 de la Constitution de 1793, qui stipulait : « quand le gouvernement viole les droits du peuple, l’insurrection est pour le peuple, et pour toute portion du peuple, le plus sacré des droits et le plus indispensable des devoirs ».
La question est alors posée : les militants progressistes laisseront-ils la France d’après promise par Sarkozy en 2007 faire place à l’après-France que veulent passionnément l’Europe atlantique et le CACa-Rente ? Ou bien, dénonçant le double verrou posé sur la France par l’UMPS et par le FNMI, saurons-nous nous unir pour sortir la France du broyeur euro-atlantique et reconstruire la République à partir des principes impérissables du Conseil national de la Résistance ?